jeudi 23 février 2023

Évolution Littéraire


Si je compare mon écriture actuelle à celle d'il y a dix ans, elle n'a pas beaucoup changé. Les textes écrits d'une traite comportent toujours cette prose poétique caractéristique de mon style. Seulement, cela doit faire une décennie (littéralement) que je n'ai pas écrit d'histoire. Je veux dire, de vraie histoire, avec des personnages, un contexte, une évolution, etc.

Je n'ai pas pu m'empêcher de faire un petit comparatif tout à l'heure. 

Avant, mes histoires étaient très inspirée, détaillées et belles. Les toutes premières n'avaient pas un très bon niveau, mais celles que j'écrivais à un niveau plus confirmé étaient sincèrement pas mal. Beaucoup mieux que ce que je suis capable de pondre aujourd'hui en tout cas, sans la moindre hésitation.

Là où je péchais par contre et le point sur lequel je me suis grandement améliorée, c'est en termes de structure pure. Au cours des dix dernières années, j'ai beaucoup travaillé sur des contenus courts, allant droit au but. Dans mon travail, il n'y avait pas nécessairement de place pour l'expression artistique ou des descriptions à rallonge qui sont pourtant essentielles à la conception d'une histoire de type romanesque.

Ce qui est paradoxal est qu'avant je voulais raconter des choses, mais je ne savais pas quoi. L'inspiration me venait, les personnages me soufflaient leur histoire et je la découvrais presque en même temps que le lecteur. C'était une expérience aussi exaltante qu'exténuante. Parce que l'inspiration venait comme une envie de pisser - ou de baiser plutôt, ça y ressemblait plus - et que je n'avais aucun autre moyen de la canaliser qu'en l'exprimant ou en la refoulant.

Dans le premier cas, je pondais de très beaux textes mais ne tenais jamais sur la durée (j'ai plein d'histoires inachevées). Dans le second, je me renfermais et cessais d'écrire (il m'a fallu huit ans pour me remettre à écrire des histoires).

Bref, la seconde situation ne m'arrangeait pas plus que la première. Si je n'écris pas, je déprime, et si j'écris sans jamais finir ce que j'entreprends, je perds confiance en moi, me renferme et déprime aussi. Le but c'est quand même d'éviter d'aller mal, non ?

Aujourd'hui, je me pose tout un tas de questions que je ne me posais pas auparavant. Par exemple : comment est-ce que je peux simplifier cette histoire ? ou encore : comment puis-je rendre ce personnage plus réaliste ?. 

Avant, je ne parvenais pas à toucher du doigt la douleur. Aujourd'hui, elle m'est familière et me tient compagnie. Je sais ce que nous avons traversé elle et moi. Je n'ai plus peur d'elle. Enfin, je crois. J'essaye de l'apprivoiser comme je peux, de la diluer dans les textes et les mots que je pose sur papier, car ici elle a un sens. Dans ma vie, en moi, elle n'en a pas. Elle n'en a plus.

C'est ce qui fait la différence, je crois, entre celle que j'étais il y a dix ans et celle que je suis aujourd'hui. Celle d'avant protégeait sa souffrance, un trésor empoisonné alors que celle d'aujourd'hui la présente comme sa vieille ennemie. 

Je parle de "trésor" car, à l'époque, il me semblait n'être qu'une coquille vide, une boule de haine, de tristesse et d'angoisse. Il me semblait n'être et ne posséder rien d'autre que cette douleur. Alors, aussi empoisonné soit-il, ce mal-être était mon trésor. Je le chérissais car il était tout ce que j'avais et tout ce qui me permettait de créer et d'échapper à une vie que je ne maîtrisais pas et refusais de vivre.

Je parle ensuite de "vieille ennemie" car ma douleur n'est plus mon ennemie. Elle l'a longtemps été, mais je comprends aujourd'hui que son message n'était pas "isole-toi, protège-moi" mais bien "ouvre-toi, libère-moi". Vous savez, quand on a la tête sous l'eau, il est facile de confondre les termes... 

Mais depuis que j'ai appris à nager, que je suis remontée à la surface, j'ai compris ce qu'elle disait. Et aujourd'hui, elle est mon amie, ma puissante alliée car elle est témoin de mes batailles, de tous mes échecs et de toutes mes victoires. Elle est ma gloire.

C'est pour cela que j'écris.

J'écris parce qu'il y a des tas de gens dans ma tête qui me parlent, me racontent leurs histoires. J'écris parce que l'enfant que je suis veut tout connaître de ce monde. J'écris parce que, de la contemplation de ma vie, il ne restera rien d'autre que ces écrits.

J'écris parce que je veux qu'un jour quelqu'un tombe dessus, par-delà le temps, par-delà l'espace et soit, comme je l'ai été, instantanément libéré du sentiment de solitude inéluctable que représente l'expérience humaine en ce monde.

J'écris car je veux raconter toutes les vies que j'ai imaginées, sans les avoir vécues, leur donner un sens, une raison d'être.

J'écris car c'est certainement cela ma raison d'être.

En dix ans, j'ai énormément perdu en termes de compétence d'écriture. Je me situe à une espèce de case départ qui n'est pas la plus agréable. Pour comparer, ce serait comme avoir été admis en sixième et devoir redoubler le CP. 

Mais ce n'est pas grave, car aujourd'hui, contrairement à avant, je sais ce que je veux dire. Je n'écris plus pour me soustraire à la souffrance. Je n'écris plus pour placer une trêve sur mon auto-destruction. Je n'écris plus pour exister. J'écris avec une intention. J'écris pour transmettre. J'écris parce que c'est ma raison d'être. 

Je n'écris pas pour exister, j'écris parce que j'existe.

Je suis devenu le personnage que j'ai créé il y a une décennie.

Je n'ai plus besoin de me soustraire à mon existence en me recréant dans des univers fictifs.

Je peux créer mes propres univers. Je peux en être le maître.

Je peux écrire et vivre ma propre histoire.

Je n'attends plus que mon héros vienne me sauver. 

Je suis devenu ce héros.

Je l'ai appelé Linami.

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